PRIX JCJC Le docteur Caroline GORIN a obtenu un financement dans le cadre de l’appel à projets génériques 2022 (AAPG 2022) de l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) pour son projet intitulé « Développement d’insert cellularisé pour la réparation de défauts osseux maxillo-faciaux 3DBioMax « en médecine régénérative cranio faciale» Il sera financé sur 4 ans par des crédits « Jeunes Chercheuses et Jeunes Chercheurs (JCJC) » Caroline Gorin nous présente son parcours professionnel et son contrat ANR Recherche.
Alors que j’étais étudiante en Odontologie à l’hôpital Bretonneau, j’ai eu la chance de faire des rencontres qui ont fortement impacté mon parcours. Mon orientation clinique a été influencée par ma participation à la création de la consultation de dermatologie buccale avec les Drs Anne-Laure Ejeil et Myriam Dridi ; mon tropisme recherche par la rencontre avec le Pr Catherine Chaussain qui m’a fait découvrir son laboratoire URP2496 en m’accueillant en stage de Master 1 à la Faculté d’Odontologie de l’ex-Université Paris Descartes puis en master 2, encadrée par Claire Bardet au sein du même laboratoire. Ces stages n’ont fait que renforcer mon goût pour la recherche et j’ai souhaité continuer par un doctorat tout en étant parallèlement Assistante Hospitalo-Universitaire à l’hôpital Bretonneau.
Mes travaux de recherche encadrés par Catherine Chaussain portaient sur les capacités pro-angiogéniques des cellules pulpaires et leur intérêt en ingénierie tissulaire. Au cours de ce doctorat, nous avons établi une collaboration avec l’équipe de Stéphane Germain au Collège de France, notamment avec Laurent Muller qui a enrichi mon projet de thèse sur le côté mécanistique de l’angiogenèse (Fig.1). Parallèlement, j’ai évolué dans le milieu hospitalo-universitaire en obtenant un poste de MCU-PH à l’hôpital Charles Foix, et peu à peu mon activité clinique s’est orientée vers la réhabilitation des cas complexes prothétiques, notamment suite à des reconstructions maxillo-faciales. Une des problématiques majeures des reconstructions chirurgicales de la sphère oro-faciale est l’angiogenèse. Mes travaux ont donc pris une nouvelle dimension avec l’étude du potentiel ostéogénique des cellules pulpaires cultivées en conditions pro-ostéogéniques mais également pro-angiogéniques, ce qui a donné lieu à mon premier co-encadrement doctoral du Dr Anita Novais (Fig.2).
J’ai pu ensuite réaliser ma mobilité recherche au Collège de France pour essayer de mieux comprendre l’impact de nos cellules pulpaires sur les cellules endothéliales dans le but de promouvoir l’angiogenèse, pré-requis à toute régénération osseuse. Nos résultats ont montré que ces cellules pulpaires avaient la capacité de jouer un rôle important dans l’établissement et la maturation du réseau vasculaire (Fig.3). Par la suite j’ai pu réaliser le CES et le DU de Prothèse Maxillo-Faciale, dirigé par le Dr Didier Maurice, à l’hôpital Lariboisière et à l’HEGP, ce qui a fini par orienter ma pratique clinique. Pouvoir faire partie d’une équipe pluri professionnelle en collaboration étroite avec les chirurgiens ORL, les prothésistes et les épithésistes afin d’améliorer les traitements et donc la qualité de vie de ces patients, est pour moi essentielle.
Son projet
Mon projet ANR JCJC a ainsi pu émerger aux contacts des patients, des praticiens et des chercheurs, avec l’idée d’arriver à combiner mon tropisme pour la recherche et l’ingénierie osseuse avec mon activité clinique. L’imagerie, l’impression 3D ont fait des progrès considérables et nous permettent désormais d’élargir le champs des possibles avec une médecine plus personnalisée et adaptable facilement pour chaque situation clinique unique. Ce projet ANR combine l’utilisation du PEEK, un biomatériau (ayant déjà les autorisations de la FDA), inerte, biocompatible, aux propriétés mécaniques similaires à l’os mandibulaire, avec un hydrogel pré-vascularisé pour permettre son intégration tissulaire (Fig.4). Ce matériau a déjà été implanté chez des patients sur des reconstructions du massif facial comme l’orbite ou le crâne, mais il n’a jamais encore été testé sur des os soumis à de fortes contraintes comme l’os mandibulaire. Le vrai challenge de ce projet est d’arriver à désigner un matériau contenant un hydrogel pré-vascularisé, afin d’optimiser son intégration aux tissus de l’hôte grâce (entre autres) à des anastomoses vasculaires, tout cela dans un contexte soumis à de fortes contraintes mécaniques comme la mastication.
Nous sommes actuellement en train de mettre au point un modèle de défaut mandibulaire chez le rat à l’aide d’un guide chirurgical, pour permettre la standardisation du défaut et l’implantation de notre futur insert en PEEK pré-vascularisé. Ce guide nous permettra de placer notre défaut critique osseux au même endroit et ainsi de limiter les biais ou autres aléas chirurgicaux.
L’équipe de cette ANR, portée par Caroline GORIN, est composée de :
• Laurent Muller, pour les laboratoires extérieurs, au Collège de France. L’objectif est de pré-vasculariser les implants afin d’améliorer la vascularisation et l’intégration complète à l’intérieur du tissu ;
• La plateforme Micro-CT du laboratoire URP2496 et la plateforme IMAG’IC de Cochin pour la microscopie biphotonique. Ils analysent les anastomoses entre les vaisseaux humains et les vaisseaux de rats par l’injection de lectines pour mettre en évidence les connexions des différents vaisseaux ;
• La plateforme Tep Scan de l’hôpital Bichat pour mettre au point des protocoles afin de mesurer le temps nécessaire à cette anastomose et déterminer si la régénération osseuse est corrélée au signal vasculaire ;
• L’équipe du laboratoire URBi2i-UR4462 dirigé par le Dr Jean Pierre Attal, spécialisée dans les techniques d’impression 3D et l’analyse des contraintes mécaniques, permettra d’optimiser la construction de l’insert en PEEK, avant de passer à l’in vivo ;
• Des Master 2 et une doctorante participeront à ce projet.
Les perspectives :
Recherche
Déposer un nouveau projet sur le gros animal comme la brebis ou le cochon, pour être dans des conditions se rapprochant du patient, en proposant des modèles de résections osseuses mandibulaires similaires à ce que nous faisons chez les patients.
Clinique
En fonction des résultats obtenus, pouvoir transférer ces résultats vers les patients atteints de cancer et ainsi espérer remplacer les tissus atteints par des biomatériaux biomimétiques, dans le but d’améliorer la qualité de vie des patients et de limiter les sites chirurgicaux de prélèvements.
l’article dans la newsletter N°5-2022/octobre