Mon parcours
Je suis normalien de formation et je viens du département d’ingénierie mécanique de Cachan où j’ai suivi une formation en génie mécanique, de 2000 à 2004, jusqu’à un doctorat en ingénierie mécanique, 2007, portant sur la fabrication assistée par ordinateur pour l’usinage grandes vitesses de formes complexes.
Ensuite, j’ai poursuivi mes activités de recherche en Conception et Fabrication Assistée par Ordinateur (CFAO) au sein du laboratoire de recherche en production automatisée en tant que maître de conférences de l’Université Paris 13. En 2012 j’ai intégré l’Unité de Recherche en Biomatériaux Innovants et Interfaces (URB2i, UR 4462, Université Paris Cité – Université Sorbonne Paris-Nord), au sein de la faculté de chirurgie dentaire de Montrouge, pour développer des activités de recherche transdisciplinaires, odontologie – science de l’ingénieur sur des problématiques de CFAO dentaire dans le cadre de la réalisation de prothèses et dispositifs médicaux. Ce sont des technologies numériques actuellement utilisées dans le milieu dentaire pour concevoir et fabriquer des prothèses en céramique pour la restauration des tissus dentaires.
En 2015, j’ai accédé au poste de directeur adjoint de l’URB2i avec JP Attal. L’objectif de ce laboratoire est de structurer une équipe pluridisciplinaire à l’interface de l’Odontologie et les sciences de l’ingénieur, avec le but de développer à la fois les biomatériaux et les nouvelles technologies dédiées à leur mise en forme en dispositifs médicaux comme les prothèses dentaires.
En 2019, j’ai obtenu mon Habilitation à Diriger des Recherches en Sciences et Ingénierie pour ma Contribution à la conception et fabrication assistée par ordinateur de pièces de formes complexes : de l’usinage de pièces mécaniques aux dispositifs biomédicaux
Tout d’abord, nous avons focalisé nos travaux autour de la caractérisation de la chaine numérique de CFAO dentaire, composée de dispositifs médicaux d’équipements comme des caméras de numérisation 3D et des systèmes de production par usinage ou par impression 3D ainsi que des logiciels de modélisation 3D et de programmation associés. Ce type de chaine numérique permet à partir de la numérisation 3D d’une situation clinique de concevoir et produire numériquement des dispositifs médicaux dentaires comme des prothèses.
Plus récemment, nous nous sommes orientés vers le développement conjoint d’un biomatériau et d’un procédé de mise en forme additif, nécessairement piloté numériquement, toujours dans le contexte de la CFAO, afin de réaliser de nouvelles prothèses dentaires de faibles épaisseurs. Ces nouvelles technologies permettront, au niveau thérapeutique, de restaurer la face supérieure de la dent, là où il y a souvent des problèmes d’érosion dentaire et de pallier au problème de durabilité mécanique de prothèses fines. Au niveau thérapeutique, l’enjeu de développer des prothèses fines durables s’insère dans la dentisterie minimalement invasive, avec l’objectif de conserver le plus de tissu sain sur le patient.
Le projet SmarTeeth
Le contrat ANR SmarTeeth, pour Smart additive manufacturing of functional graded glass-ceramic for durable bio-inspired Teeth restorations, porte sur la fabrication additive de vitrocéramique à gradient fonctionnel pour des restaurations dentaires bio-inspirées de fine épaisseur. La démarche scientifique repose sur le concept de bio-inspiration reprenant le comportement mécanique des dents saines pouvant résister mécaniquement à des millions de cycles de mastication et d’occlusion. Nous nous inspirons des propriétés mécaniques et de la microstructure de la dent pour concevoir un biomatériau ayant un gradient de propriétés mécaniques. Nous développons en parallèle un procédé additif qui consiste à faire varier à la fois la composition du matériau et donc les propriétés mécaniques de la prothèse lors de sa mise en forme.
L’objectif de SmarTeeth est donc à la fois de développer une famille de matériaux pour obtenir les propriétés mécaniques attendues et de développer un procédé de fabrication additive pour pouvoir mettre les biomatériaux sous la forme d’une prothèse, en 3D.
Avec les procédés d’usinage utilisés actuellement en CFAO, la composition du matériau est réalisée en amont de sa mise en forme prothétique. L’avantage des procédés additifs est de réaliser la composition et la mise en forme simultanément ce qui nous permet de nous adapter à chaque situation clinique tant sur le plan anatomique que mécanique.
Nous nous appuyons sur la preuve de concept issue de nos résultats en simulations numériques qui ont montré qu’une prothèse fine occlusale, conçue avec des matériaux à gradient de propriétés mécaniques, avaient une durabilité mécanique améliorée au regard de la même prothèse conçue avec un matériau sans gradient comme ceux actuellement utilisés cliniquement.
Des premières formulations de matériaux ont été réalisées pour atteindre la gamme de propriétés mécaniques optimales définies à l’aide de nos simulations numériques. Actuellement, nous travaillons en collaboration avec l’Institut de Physique du Globe (IPG) spécialisé sur les vitro céramiques et partenaire du projet SmarTeeth. Il s’avère que les matériaux qui pourraient convenir sont très proches des géomatériaux vitreux qui sont présents dans la lave volcanique. Une démarche de dialogue entre simulations numériques et formulations des matériaux permet d’établir le lien entre les propriétés mécaniques atteignables et les compositions matériaux réalisables.
Nous collaborons aussi avec des membres de l’Institut de Céramique de Limoges (IRCer) qui sont les précurseurs dans la fabrication additive et l’impression 3D de céramiques. Ils possèdent des compétences sur les technologies de fabrication additive céramique et le développement des machines qui permettront de mettre en forme nos compositions céramiques.
Nous collaborons aussi avec le laboratoire Mécanique Paris Saclay (LMPS) pour la partie caractérisation mécanique avancée des biomatériaux. Dans notre équipe, nous avons des compétences pour la caractérisation mécanique macroscopique et avec LMPS nous ferons le lien entre la structure des matériaux et leurs propriétés mécaniques à l’échelle microscopique.
La démarche de recherche adoptée repose sur l’ingénierie simultanée produit-matériau-procédé : développement simultané du matériau, du procédé de mise en forme et de la prothèse sans qu’il y ait de cloisonnement des tâches entre les partenaires. Dans cette démarche les différentes expertises et compétences sont en dialogue permanent : l’URB2i étant le spécialiste de la conception et production de DM dentaire, l’IPGP spécialiste de la formulation de vitrocéramique, l’IRCer spécialiste de la mise en forme 3D et le LMPS d’essais de caractérisation mécanique.
Nous impliquons également des chirurgiens-dentistes dans l’équipe pour le développement et la conception de la prothèse pour savoir si cliniquement le praticien pourra la coller sur le tissu dentaire résiduel du patient.
Ce contrat est financé sur quatre ans avec des objectifs de réalisations de prototypes d’une gamme de matériau et de la technologie additive qui seront valorisés par des brevets. Suite au projet SmarTeeth nous envisageons de transférer la technologie vers la clinique par la mise en place d’un démonstrateur s’appuyant sur des études cliniques (PHRC) et la réponse à des appels à projet de pré-maturation technologique (Idex, INSERM, Région,… ).
Les technologies pour la santé bucco-dentaire
Au sein de l’URB2i, j’anime et pilote de nombreuses activités autour des technologies numériques pour la réalisation de dispositifs médicaux dentaires et leurs déploiements en cabinet ou service hospitalier dentaire. Le marché de la CFAO dentaire associé à l’impression 3D de polymères est en train d’exploser comme par exemple pour le traitement du bruxisme par gouttières imprimées 3D. Enormément de machines et de matériaux sont mis sur le marché et, les praticiens sont démunis face à la quantité de nouveautés. Ils n’ont pas de recul sur la qualité des dispositifs médicaux d’équipements proposés. Nous leur apportons des informations pour leur permettre de faire des choix selon les thérapeutiques qu’ils ciblent et nous leur indiquons des nouvelles thérapeutiques avec ces technologies.
Par exemple, nous travaillons sur le développement d’un protège-dent imprimé 3D pour les activités sportives pour offrir une alternative aux sportifs amateurs entre les dispositifs haut de gamme pour les sportifs de haut niveau et les bas de gamme vendus dans les magasins de sport mais ne protégeant que partiellement les tissus dentaires et limitant très peu les risques de fractures de l’articulation temporo-mandibulaire. L’idée est de fabriquer des protège-dents sur mesure plus performants en termes de protection, tout en étant abordable à l’achat. L’idée est de développer un dispositif médical sur mesure et accessible au plus grand nombre de personnes. Par exemple, il n’est pas concevable pour des enfants pratiquant des sports de contact et en pleine croissance, d’investir tous les ans dans un protège-dent haute de gamme.